Le coeur en exil

Mahmoud Darwich est décédé en 2008 à Houston au Texas après une vie d’exile, loin de sa patrie palestinienne. Tout le village de sa famille en Palestine avait été détruit par les soldats israéliens. La famille avait dû quitter le pays et il leur a ensuite été interdit de rentrer dans le pays parce qu’ils étaient « sans domicile». Même en exile, il avait été poursuivi et harcelé par des agents du gouvernement israelien pour ses écrits, directs ou obliques, sur l’occupation de son pays

Le coeur en exil
(Pour Mahmoud Darwich)

J’ai demandé à la lune si je devais errer ou si je devais revenir.
Elle m’a dit:
Si vous errez, je vais vous baigner de lumière.
Si vous revenez, je vais entrer chez vous à pas de loup par les intervalles des volets.

J’ai demandé au ciel si je devais errer ou si je devais revenir.
Il m’a dit:
Si vous errez, je vais vous saupoudrer d’étoiles.
Si vous revenez, je vais vous envelopper dans la nuit épaisse.

J’ai demandé à ma muse si je devais errer ou si je devais revenir.
Elle m’a dit:
Si vous errez, vous devez chercher vos paroles dans des petits coins cachés.
Si vous revenez, vous les trouverez chez vous toutes étalées en vous attendant.

J’ai demandé à la terre si je devais errer ou si je devais revenir.
Elle m’a dit:
Si vous errez, vous écrirez vos textes dans le sable devant le vent fortifant.
Si vous revenez, vous les graverez sur les pierres de votre maison devant les bulldozers.

J’ai demandé à mon coeur si je devais errer ou si je devais revenir.
Il m’a dit:
Si vous errez, je battrai à un tempo rugeux.
Si vous revenez, je battrai au tempo de quelqu’un d’autre.
Mais je bats encore.

J’ai demandé à mon amour si je devais errer ou si je devais revenir.
Elle m’a dit:
Si tu erres ou si tu reviens, cela m’est égal:
Pour moi tu es comme perdu.